10 septembre 2008

Escalettes et l’équipe de F…FF !

Je ne sais pas si vous avez lu l’Équipe d’aujourd’hui, mais il y avait un article très intéressant retranscrivant le procès verbal du conseil fédéral de la FFF du 3 juillet dernier devant décider de l’avenir de Raymond Domenech en tant que sélectionneur de l’équipe de France. Qu’y apprend-on ? Notamment que Jean-Pierre Escalettes, président de la FFF, a tenu les propos suivants : « La Fédération est une famille, pas un club. La campagne des anciens de France 98 a été trop insistante, parfois indécente. L'équipe de France est le patrimoine de la Fédération, pas celui d'un clan ».

 

Selon M. Escalettes, donc, « l’équipe de France est le patrimoine de la Fédération ». Première nouvelle ! Et ce depuis quand je vous prie ? Je ne saurais vous conseiller de consulter la définition exacte de « patrimoine » pour vous rendre compte de la portée de ces mots. Du moins, ils en disent long sur la dérive bureaucratique et clientéliste de la FFF. On savait déjà que le conseil n’opérait pas à un vote à bulletin secret, que les membres du conseil allaient rarement contre l’avis de leur président. Mais que celui-ci en vienne à confondre son rôle réel, qui consiste à prendre les décisions nécessaires quant au choix du sélectionneur afin de rendre l’équipe aussi compétitive que possible, avec son fantasme (l’équipe de France m’appartient) est complètement intolérable. L’équipe de France, comme son nom l’indique, est le patrimoine des Français, de ceux qui la supportent, et de ceux qu’elle représente. Ni plus ni moins. La FFF n’est qu’en charge des décisions à prendre pour la rendre la plus performante. Point barre. Toutes les instances du foot et la ministre des Sports devraient exiger la démission de M. Escalettes pour ces propos inadmissibles.

 

Deuxième aberration, corollaire à la première, le refus de remplacer Domenech sous prétexte qu’il ne faut pas laisser l’équipe de France entre les mains du « clan » des champions de 1998. D’après M. Escalettes, donc, il vaut mieux une mauvaise équipe de France entraînée par Domenech qu’une bonne équipe de France entraînée par Deschamps. Ce qui n’est rien d’autre que de l’irresponsabilité totale, puisque M. Escalettes ne devraient avoir aucun autre souci que les résultats de l’équipe nationale. Qualifier les champions du monde de 1998 de « lobby » est en soi attiser la guerre des « clans ». Et ce d’autant plus que l’on connaît la diversité des parcours des champions de 1998, rendant cette accusation ridicule et sans fondements. S’il y a bien un clan, c’est celui de la FFF, qui ne choisit que des entraîneurs proches de la DTN, et qui veut garder le gâteau pour elle seule.

 

Le match contre la Serbie va, je l’espère, être enfin l’occasion de mettre les points sur les i, et de faire le travail qui aurait dû être fait au lendemain matin de la défaite contre l’Italie : se séparer d’un entraîneur dont les résultats ont été insuffisants, et mettre l’équipe sur de nouvelles bases pour les qualifications de la Coupe du Monde 2010. Maintenant, on peut seulement, et à juste titre, être écoeuré que les états d’âme de M. Escalettes se sont avérés préjudiciables pour les résultats de l’équipe de France, et sont en passe de lui coûter cher, très cher.

8 septembre 2008

Sans liberté de blâmer, il n’est point d’éloge flatteur : hommage à l’Esprit public de Philippe Meyer

Ce n’est plus un secret pour personne, le mot de Cambronne est très 

critique vis à vis des médias audiovisuels français et de leur tendance à brider le débat public. C’est pourquoi, après plusieurs articles invectivan

t le manque de professionnalisme, voire l’incompétence des journalistes chargés de la noble tâche de véhiculer l’information, et avant les nombreux autres de la sorte qui vont suivre, je me dois de montrer que mon propos n’a pas seulement vocation à dénigrer systématiquement toute entreprise audiovisuelle, loin s’en faut. Le pouvoir de la parole et de l’image étant une chose trop important pour n’être confiée qu’à des amateurs (admirez l’analogie !), il est aussi de mon devoir de rendre compte lorsque des gens intelligents, sensés, et dotés d’une conscience très professionnelle, l’utilisent à bon escient.

 

Philippe Meyer, qui présente l’Esprit public tous les dimanches matins à 11h sur France culture, est de ceux-là (sachez-le, la radio est souvent de bien meilleure qualité que la télé…). Pour ceux qui ne le sauraient pas, son émission consiste en un débat sur un sujet d’actualité entre un invité (qui change chaque semaine) et trois consultants permanents que sont Max Gallo, Jean-Louis Bourlanges et Yves Michaud. Cette émission est une des meilleures selon moi, dans la mesure ou elle traite de sujets variés et importants (pas de faits divers, Dieu merci !), présente différents des points de vue, essaie de donner de la consistance et de la hauteur aux événements, et donne la parole à des personnes intéressantes, qui ont le temps de développer leur thèse. Pas de duplex, pas de réaction en direct des auditeurs, pas d’interview, pas de recherche du scoop, généralement pas d’invités « star », pas de nécessité pour les participants d’exprimer leur pensée en moins de 30 secondes, pas 150 sujets traités à la fois, pas de propos approximatifs (aussi bien dans la forme que sur le fond) etc., bref, tout ce qui n’est pas à la mode dans le monde audiovisuel du XXIè siècle. Et pourtant… l’Esprit public est une des seules émissions de radio que j’essaie d’écouter assidûment, et qui donne une réelle valeur ajoutée à l’information tout en stimulant la réflexion de l’auditeur sur l’actualité.

 

Or, à l’occasion des 10 ans de l’émission, le 31 août dernier, Philippe Meyer en a profité pour rendre hommage aux auditeurs de l’Esprit public et établir un diagnostic de la situation actuelle des médias audiovisuels : « L’Esprit public aura dix ans au milieu de cet automne, c’est l’occasion de dire à propos d’une émission dont beaucoup d’augures considéraient que le pari qu’elle faisait d’entretenir une conversation entre des personnes qui essaient de donner à l’actualité l’épaisseur du temps et de la connaissance étaient un pari voué a l’échec, et c’est aussi l’occasion de dire que c’est une des démonstrations – grâce à dieu France culture n’en est pas avare – que la crise que connaissent aujourd’hui les industries de communication est une crise de l’offre et non pas de la demande, et liée au peu d’audace de ceux qui dirigent les chaînes de télévision, même du service public, et non pas à l’absence de curiosité et de disponibilité du public. »

 

Ces propos reflètent tout à fait mon sentiment vis-à-vis de la télévision, dont les programmes qui rivalisent en ingéniosité dans l’idiotie sont bien la preuve concrète que Jean-Baptiste Say avait raison (l’offre crée sa propre demande). Les téléspectateurs n’ont jamais formulé massivement la demande explicite d’un divertissement dans lequel des couples se sépareraient pour tester leur résistance à la drague de célibataires au fort sex appeal, ou encore d’une émission où les participants seraient rassemblés dans un loft, qui plus est chacun avec un secret que les autres doivent deviner… Bref, l’Esprit public, c’est peut-être old school, mais au moins, si ça ne plaira pas à certains, ça aura le mérite de ne pas les abrutir. Moi je dis Merci Philippe Meyer, et vive l’Esprit public !

6 septembre 2008

RAMSES 2009


Le dernier rapport annuel de l'Institut français des relations internationales (IFRI), RAMSES 2009,  a été publié le 3 septembre dernier.
C'est un ouvrage qui traite des grandes questions internationales, d'abord par thèmes (sécurité et économie), puis par régions, et que je recommande fortement. Comprenant plus de 50 articles relativement courts (généralement 3 à 7 pages) et surtout accessibles à tous, RAMSES 2009 offre un panorama très utile du monde actuel.
Mettez donc 25 euros de côté pour achetez ce livre, qui vous rendra sans aucun doute plus familier avec la complexité du monde ainsi que ses évolutions.

2 septembre 2008

TF1 en Ferrari


Il est, paraît-il, toujours louable de vouloir changer quelque chose de mauvais. Pourtant, lorsque l’on voit les modifications que Laurence Ferrari veut apporter au journal télévisé de TF1, il y a lieu de s’inquiéter. Le JT de TF1 (celui de France 2 aussi) nécessite effectivement une réforme en profondeur : révision de la hiérarchisation des informations, plus d’efforts sur le traitement des grandes questions internationales, appel aux spécialistes plus souvent et surtout plus longuement, et enfin limitation les interventions inutiles généralisées. Laurence Ferrari, elle, le voit tout autrement. Nonobstant ses qualités indéniables de présentatrice, les évolutions qu’elle propose vont, selon moi, dans la mauvaise direction :

 

-       « plus de direct ». La contingence étant ce qu’elle est, les événements arrivent rarement tous entre 20h et 20h30. Qu’est ce que cela veut donc dire ? Je crains que cela signifie que l’on donnera encore plus la parole aux « gens sur le terrain » lors du JT, vous savez, les envoyés spéciaux sur place qui nous expliquent pendant cinq minutes qu’ils ne savent rien de plus que ce qu’on sait déjà, ou encore les témoins qui nous expliquent qu’ils ont vu le feu se propager, l’accident se produire, les nuages arriver, l’eau mouiller et le vent souffler etc. Bref, c’est ce à quoi il faut s’attendre, et cette évolution est d’autant moins souhaitable que dans cette recherche accrue de l’instantané, du scoop et de l’émotion immédiate, les journalistes finiront par dire encore plus d’âneries que ce qu’ils disent déjà. Florence Schaal, « spécialiste » de ce genre de reportages, et dont la performance a été d’annoncer en direct la mort d’un jeune garçon en réalité encore vie, en sait quelque chose.

-       « sujets plus longs, sous forme de dossiers de deux à trois minutes ». Remarque qui pourrait s’avérer pertinente si elle faisait référence aux sujets VRAIMENT importants. Cependant, ce n’est pas ce qu’indique le troisième point…

-       « renforcer les sujets dits de société ». Oula. La durée du JT étant un jeu à somme nulle, ce « renforcement » se fera indéniablement au détriment des autres sujets. Net parti pris, donc, puisque cela ne signifie rien d’autre que Laurence Ferrari présuppose que les sujets de sociétés sont plus importants que les questions politiques, économiques et internationales. Ou alors c’est simplement révélateur d’une volonté de susciter l’émotion la plus immédiate chez le téléspectateur, aux dépens d’un recul et d’un esprit critique dont il a pourtant besoin pour aborder les questions qui se posent à lui, citoyen responsable.

-       « Affirmer son point de vue éditorial ». Dernier point, mais pas le moindre. TF1 va-t-il assumer au grand jour qu’il vend des cerveaux à Coca ? A la lumière des points précédents, je pense plutôt que TF1, comme 90% des médias – quelle surprise ! –, optera pour le traditionnel tryptique « droit de l’hommisme-multiculturalisme-pacifisme zélé », tout simplement parce que ce sont des convictions faussement difficiles à défendre de nos jours et les plus représentatives de la pensée unique actuelle.

 

Certes il ne faut point juger avant de connaître, et je tiens à donner à mon analyse la mesure qu’il se doit : tout cela n’est que simple conjecture. En temps normal, on a plutôt tendance à souhaiter que les actes se rapportent aux mots ; dans ce cas, permettez-moi juste d’espérer le contraire.